Joy Division: Unknown Pleasures (1979)
"We were small-town boys: Steve and Ian came from Macclesfield; Hooky and I were from Salford. We'd spent two years playing dives and dumps, and we were finally on the cusp of becoming really big with a tour of America. Nowadays, people fly to New York every day to go shopping. In those days it was a big thing. We were all so excited about it. But, for Ian, there was the thought of going over there and having fits in front of people during a gig. Sometimes a drumbeat would set him off. He'd go off in a trance for a bit, then he'd lose it and have a fit..." (Bernard Sumner)
Where: Recorded at Strawberry Studios, Stockport, England
When: 1979
Who: Ian Curtis (vocals), Bernard Albrecht/Sumner (guitar, keyboards), Peter Hook (bass), Stephen Morris (drums)
What: 1. Disorder 2. Day Of The Lords 3. Candidate 4. Insight 5. New Dawn Fades 6. She's Lost Control 7. Shadowplay 8. Wilderness 9. Interzone 10. Remember Nothing
How: Produced by Martin Hannett
Up: début post-punk-pop en poum-tchac péri-synthétique assumé, Robert Smith prend déjà des notes, mais roulements caillouteux caractéristiques puis riff bancal à la basse Rickenbaker en lointains échos funk avec saut de corde et corde de Mi qui sature, arpèges simples, envoûtants, tout le vrai goth est là, du gloom sautillant, Ian se présente pour l'éternité "I've been waiting for a guide to come and take me by the hand", voix sépulcrale, la théâtralité bauhausienne en moins, oppressant sans être étouffant, une subtilité, puis une montée dont Cure se souviendra aussi, en petites touches pop, Hook s'affranchit un peu de sa ligne, pour un peu les drums sonneraient guillerets, tout le post-punk aussi dans ces riffs de guingois de funk grippé, la voix apocalyptique de Curtis direct dans les veines, zéphir discret de synthé en fond, plombé mais majestueux, les roulements vers le pont, puis Sumner emboîte les sons, cette voix basse de stentor épileptique, puis les cris indignés "Feeling, feeling, feeling !", la basse en vertigineuses volutes, fin synthétique ensorcelée ["Disorder"]... procession de basse menaçante, ralenti hiératique sur arpèges clinquants, du doom post-punk peut-être ? avec grattage funky de gratte, Tony Iommi en influence improbable, même économie des notes terribles, la voix encore plus pesante, progression de notes rebattue et ici tout à fait originale, une grandeur tragique, puis une envolée délicieusement laborieuse sur fond de synthé et de basse ronronnante, l'ambiance est lourde, zébrée d'un petit filet de synthé et dynamisée par des fausses cocottes funky aux barbelés, chant terrifiant bien sûr, ça se calme, retour intro, du thrash en défilement image par image en fait, la grosse basse de Hook en star, Ian impérial dépressif sans complaisance, plus théâtral cette fois-ci aussi, part dans un cri retenu depuis trop longtemps, "where will it end!!!", fin en gros riffs charriés au médiator pelleteuse, très loin de la Compagnie Créole ["Day Of The Lords"]... le son qui monte progressivement, une basse rugueuse qui se laisse discerner, semble près de disparaître, un beat, des bruits industriels en fond, Ian essaie la version crooner névrosé, rythmique comme en attente, un son de basse maladif, purulent bien pris en note par Gallup, avec parfois des échappées en rondeur, des roulements musculeux et une Rickenbacker inventive, tout le génie rythmique blues-free du post-rock est là, Talking Heads, la virtuosité en plus, chant de Curtis parfois sur un fond de drums seulement, au bord de l'extinction, jeu de cymbales, parents pauvres du rock, splendides, Ian qui rumine, on finit sur un beat arythmique ["Candidate"]... rien, des bruits, de porte peut-être, puis un nouveau riff riche de Hook à la basse métallique, dans les aigus bien sûr pour commencer, avec poom-tchac-tchac encore neuf pour quelques années, c'est encore Hook qui tient le tout en explorant ses univers frettés en médiator de limaille, Ian y promène son désespoir, mélodies distordues, petit souffle beat de synthé derrière, le riff scie tout sur son passage, fait pulser un peu, Ian tient la note comme un vrai chanteur, explosion de synthé bruitiste sur aigus de basse et pulsation ronde, les pêches de basse, les poopoo gainsbouriens en fond, des micro-explosions noisy, shebam pop weezz, avec basse lancinante dans les aigus, fin sur une corde de métal ["Insight"]... comme une recherche de station de radio, un beat passe-partout anonyme, la grosse basse rêche qui remonte le manche et commet un nouveau riff littéralement sidérant, la gratte en grosse phrase à la Duane Eddie, tout en lourdeur heavy, les roulements derrière, un plaisir, le beat qui change, conduit par un riff qui évolue, qui monte, redescend pour une fois, une belle intro presque progressive, Ian qui déboule en douceur sur un tapis d'arpèges aux grosses mailles de basse, tellement beau qu'on laisse tourner que la rythmique, le rock renouvelé, Ian laisse passer un roulement puis perd patience, désespère violemment, Sumner brode sur ses grattes, la voix qui tient la note, presque du lyrisme, la compo la plus riche en tout cas, toujours ce souffle épique industriel, part dans un ad lib guitaristique au ralenti puis évolue entre solo et rythmique, la basse qui vise le trou et fore, tout s'arrête sauf le beat... qui goes on puis s'arrête ["New Dawn Fades"]... batterie synthétique, riff en notes ultra-aiguës de la basse comme d'hab', tout le jeu de Gallup là-dedans quand même, si haut qu'on jurerait entendre un synthé, voix d'outre-tombe, enveloppé d'écho de Curtis, roulement splendide, riff garage de Sumner derrière, Ian s'intéresse au cas d'une nana épileptique, s'étonne-t-on, du disco pervers encrassé de gros riff garage, les roulements, toujours ["She's Lost Control"]... basse qui doodoodoone sur lit de cymbales, quelques notes seulement à la mélancolie presque hispanisante, ces basses un peu frisantes qui saturent sur la corde de Mi, superbes cymbales décidément, le riff qui éclate, dynamique plutôt inhabituelle, la gratte qui croustille sur un beat rock, Curtis debout sur son char d'assaut dans la nuit vitupère, prophétise du sombre, soudain l'incroyable : le solo aigu à forte assise rythmique, pleureur aussi, des zigouigouis synthétisés, solo énervé en fait, tourne et reste mélodique, le bastonnage circulaire de fûts pour relancer la machine, basse imperturbable, Hook rules, ça cingle au niveau six-cordes, Sumner en remet une couche avec du gros riffage, un beat qui finit par fonctionner, tout l'art du post-punk mancunien, les voix doublées un court instant peut-être, coquetterie de Curtis qui s'excuse avec des cris terrifiants, Sumner repart en solo mélodique, feedback et larsen prêts à bondir, et même des tirés, la division rocke dans la joie ou presque ["Shadowplay'"]... la basse qui enclenche un riff au glissé funky toujours un peu singulier avec beat de drums en poum-tchac-tchac again, la gratte tout à déverser des noirceurs industrielles déprimées, Curtis dessus comme aucun autre, presque de la pop goth dans son genre, toujours ces rythmiques improbables qui s'installent en quelques dizaines de seconde dans la tête, Ian essaie de coller un tout petit peu au riff sur sa fin, du funk froid clinique cassant mais avec le côté viscéral qui manque aux intellos newyorkais, écho sur caisse claire tant qu'on y est, Hook varie toujours en subtilité pour pas perdre le bénéfice d'un riff durement installé, riffage mélodique épique en instrumental, gros son indus, Sumner envoie, l'air de rien ["Wilderness"]... intro, oui, poom-tchac seulement cette fois-ci, l'essentiel se passe côté charleys, puis le riff fifties qui se loge par-dessus, incroyable la basse se met dans sa roue sans jouer les chemins de traverse péri-funky, Curtis joue à se répondre d'une baffle à l'autre, laisse tomber les dignes lamentations, on stoppe même le tout en mode trad-rock avec micro-riff qui relance, sur silence des instruments, la charge, du goth fifties, morgue de Curtis aux nets accents loureediens, pont en gratouillis de gratte et double chant décalé, synthé qui hurle derrière, Sumner qui a envie de débrider sa gratte, on le sent, belle compo audacieuse, l'ombre de Reed qui plane sur cette metal music machine ["Interzone"]... intro en feedback, ambiance sourde et beat décalé, soudain la note de basse éléphantesque, froide et métallique, la gratte qui cocotte sur une corde aiguë, un splash de cymbale synthétique, tout est comme ralenti, une bouteille brisée fait tressauter à gauche, une longue note tenue par Ian, climat gentiment mortifère, basse traitée, artificielle, des intonations à la Iggy sur une compo à la "We Will Fall" des Stooges, une note de basse qui dit tout et ne dira rien de plus, la guitare qui creuse son sillon sur des clashs de synthé, c'est beau au fait, et puis cette voix, plus théâtral cette fois-ci aussi, monologues et hurlements, les bruitages, bris de bouteille mais sur le canal droit cette fois-ci, tout semble prêt à s'éteindre, comme sur un balancier... message reçu ["Remember Nothing'"]...
Down: Rien.