Lord Sutch: And Heavy Friends (1970)
"I had the first line-up of good rock'n'roll musicians. Mick Jagger and Brian Jones were trying to form a band and they kept borrowing all my guys. They borrowed all of them except the guitarist. They had Carlo Little on drums, they borrowed Nicky Hopkins on piano and Ricky Fenton on bass... [...] So literally they used four ex-Savages for the early line-up of the Stones. Carlo, who was known as the top drummer in London, did a lot of shows with Mick Jagger and Brian Jones. I used to see Mick Jagger carrying his drum kit and putting it in the back of his estate car and driving him around like a chauffeur - it was weird! I know how big Jagger is now, but back then he was just another snotty-nosed student trying to get on..." (Screaming Lord Sutch)
Where: Recorded at Mystic Studios in Hollywood
When: 1970
Who: Screaming Lord Sutch (vocals), Jimmy Page (guitar), Jeff Beck (guitar), Noel Redding (bass), John Bonham (drums), Nicky Hopkins (piano, keyboards), Kent Henry (guitar), Richard Brown (bass), Martin Kohl (bass), Rick Brown (bass), Daniel Edwards (bass), Carlo Little (drums), Bob Metke (drums)
What: 1. Wailing Sounds 2. 'Cause I Love You 3. Flashing Lights 4. Gutty Guitar 5. Would You Believe 6. Smoke And Fire 7. Thumping Beat 8. Union Jack Car 9. One For You, Baby 10. L-O-N-D-O-N 11. Brightest Light 12. Baby, Come Back
How: Produced by Jimmy Page
Up: riff à une corde englué dans son grésillement, se fixe en riff syncopé swingué rock, un cri de Sutch et une entrée kolossale, natürlich, de Bonham, triolet à la double grosse caisse et fûts géants bien sûr, des giclées généreuses de wah-wah débridées de Page, une structure blues pour que Sutch se perde pas, des soli de Jimmy dans tous les sens, curieusement à consonance fortement beckienne période Yardbirds, Sutch en voix crasse, grosse et grasse parfaite, le pont de Jimmy en apesanteur à la "Travelling Riverside Blues" et Bonham qui mitraille à la grosse caisse, un début de solo en hammer-on vulgos donc génial, avec vibrato puis solo très "Travelling" itou d'ailleurs, ça va en rendre jaloux mais c'est sublime, rebascule sur le pont aérien, du rock euphorique, Page s'échappe sur la droite avec des soli flûtés à tomber, Sutch chante comme une truie et voit pas où est le mal, une fin avec des appuis en wah-wah, sur gratte râpeuse et basse en walking de Redding, voix cassée de Sutch, et wah-wah qui se vautre, un chef-d'œuvre garage-rock, oui ["Wailing Sounds"]... wah-wah encore à l'honneur, fluette et couineuse cette fois-ci pour une nouvelle intro bruitiste qui se cherche, un riff crade et pédestre vintage stoogien, avec soli magnifiques de Page, du proto-punk avec une intro de Jimmy hallucinante d'assurance, un coup de pinte et Sutch se lance, chant consternant, punk, qui se cale scolairement sur le riff, Page est stupéfiant, des soli d'une présence renversante, clin d'œil à son pote John Henry qui, surprise, a choisi de taper fort, concasser et assourdir alentour, Jimmy s'enfonce dans sa recherche de sonorités et s'éclate, ça s'entend, part en solo crémeux, sort tous ses plans en surfant sur l'avalanche Bonham, Redding roi de la partie de basse efficace bien sûr, ça bûcheronne collégial, Sutch vocifère, Page en rajoute à la wah-wah avec des plans à la Jeff, un dérapage final, c'est plié ["'Cause I Love You"]... intro en son clair, wah-wah expérimentale bien sûr, mais rapidement le riff à la Bo Diddley, on a compris, on attend un Bonham très méchant, il déboule vicieux et deux fois plus fort, c'est Redding qui assure la conduite du riff à la basse, Page part en plongée dans une wah-wah aquatique, Sutch joue à se répondre d'un canal à l'autre, la wah-wah en trémolo qui palpite, bah oui c'est vulgaire et splendide, Bonham menace de vampiriser le tout mais Jimmy, seul, peut contrebalancer, Redding se dépoussière le manche, Page se répand et écoute son pote John en pensant au prochain Led Zep, part soudain dans une exploration de sa gratte en accords glissés avec petites sonorités country proto "The Song Remains The Same", riffe un peu en sortant, on fait tourner, une daube virtuose qu'on écouterait en boucle, Redding s'énerve un peu, Page se fait dément en rabotant à la rythmique, déverse de l'huile pentatonique bien chaude et s'envole en fin de parcours ["'Flashing Lights"]... Beck à la gratte cette fois, un riff sauvage, proto-Cramps, au piano Hopkins toujours aussi lyrique, la gratte en pompe rockabilly, Jeff qui pense à Cliff Gallup, des sorties beckiennes superbes, ambiance fifties avec voix d'outre-tombe noyée d'écho du Lord, deux grattes en même temps, pour faire bonne mesure, la dégringolade bienvenue dans le pont, Jeff en solo encore et toujours inventif et racé, doublé ici sur la cavalcade de basse, très pro en fait, le piano honky-tonk de Nicky, des remarques de dernières minutes de Beck pour clore le truc, un grand absent aux drums évidemment après les trois premiers titres ["Gutty Guitar"]... la pompe sur deux cordes, la batterie qui s'insère dans un titre furieusement sixties, vraiment trèèès forts ces drums, une petite ritournelle hippie avec chœurs foireux enfumés, quelques accords bien cinglants, et, soudain, le break en riff bien syncopé sur pâmoisons des backing-vocals à la Spirit et Steppenwolf, une autre époque, ni Page ni Beck mais le titre est sauvé, des trouvailles et surtout ce break de grattes aux sonorités souterraines, un solo fuzzé, bien méchant, à la Kaukonen qui part dans des hauteurs insoupçonnées sur des drums caracolants en roulements perpétuels soit l'inverse exact de la puissance bonhamesque, surprenant ["Would You Believe"]... riff stoogien again, le dira-t-on assez, drums en batterie de cuisine, absence de frappe et de son remplacée par l'exploration systématique de tous les fûts, Sutch chante toujours pareil et nous emmerde, sait qu'on en redemande, un bon titre à la production méchamment enterrée, la même chose avec Iggy, on se prend à rêver, tiens un pont psyché avec pompe à la basse et notes tremblées de guitare, une gratte qui s'arme à droite, se répond toute seule comme une grande à gauche en licks rockabilly, un cri raté de Sutch qu'on applaudit à deux mains, un solo pagesque d'une splendeur immaculée, on laisse tourner la rythmique, stop, ça repart, un chant affreux noyé dans la reverb, une réussite ["Smoke And Fire"]... oh le riff 100% rock, Téléphone s'en souviendra d'ailleurs mais en fera un hit, on fait tourner sur une structure blues, Bonham rafle encore la mise et emporte tout, pied de grosse caisse monstrueux comme un roulement de Ringo, le riff bien crunchy, Redding s'échappe, chant pourri donc parfait de Lord, comment oublier ces drums flamboyants et ce génie du riff de Page, seul qui paraît quatre, petit pont en rythmique pigeonnante, vite le solo Page en met partout, en renverse à côté, des tirés abominables et cette fin de riff en caisse claire martelée, ça repart, Page, pro, fait tourner ça comme si c'était "Whole Lotta Love" ["Thumping Beat"]... riff dégringolant puis en accéléré bien pourri, Bonham s'invite en défonçant la porte, on est en start and stop à la "Sweet Little Sixteen" et il faut pas faire ça à John qui remplit tout et étouffe en laissant respirer au minimum, subtil en fait, ça riffe à gauche et à droite, tout le monde s'éclate, que les drums sont costauds bordel, solo étique sur le côté, bien poussif, Bonham frappe encore et toujours, englobe le riff, le porte, Sutch se balade micro à la main, mais le show-off c'est entendu, c'est John, Page mate la bête en réintroduisant des riffs gras, Sutch hésite et crie ["Union Jack Car"]... riff sympatoche, en gratte claire, bien sixties, batterie militaire par-dessus aïe, Sutch s'y trompe pas et chante le riff, des petits accords clairs giflés, encore un break en pompe et voix spectrale, micro-soli pagesques à gauche et droite, comment font-ils : ça marche, solo anthologique de Page tout pulpé et corsé, suivi d'interventions festives sur le canal droit, fin pas du tout pagesque, emballé, c'est pesé ["One For You, Baby"]... oh le titre, on épelle le nom de la capitale donc autant commencer par un riff pourri, muzak ou slow ?, ça solote un peu à droite, le riff est stoogien à gauche, petite batterie, manque Bonham là-dessus, fallait pas l'inviter, voix caverneuse et méchante de Sutch, effrayante pour les moins de 5 ans, toujours des micro-solis splendides sur la droite, presque une compo l'air de rien, chant affligeant mais quelle symphonie de gratte, Page à coup sûr, solo bien énervé, puis un autre, très court, mais rocker superbe, une armée de guitares le Jimmy ["L-O-N-D-O-N"]... une corde qui s'est perdue, des arpèges, entrée d'une grosse basse dégringolante direct Haight-Ashbury, pas mal mais on bascule sur un titre sixties enfumé avec gros orgue vomitif et voix émue, basse surmixée et chœurs patchouli, beurk, c'est con c'est la plus longue de l'album, grattes grattouillées en accords folk vaguement électrisées, petit solo gorge noué, batterie inventive mais après qui-vous-savez, soudain le break avec rythmique Grand Funk et solo Jorma, tout ça se calme bien sûr, allez on la garde mais faut pas recommencer, hein ["Brightest Light"]... le riff irrésistible en wah-wah shunté, basse collée par-dessus et c'est parti, Sutch prend son pied, Bonham défonce la gueule du riff, on sent et on sait que ça va éclater, mais Sutch choisit déjà de nous cajoler, la wah-wah un peu crunchy, allez c'est parti on pompe "You Really Got Me" avec tonnes de wah-wah par-dessus et Bonham qui fait des breaks dans des espaces infinitésimaux, on tient la rythmique, John fait rien qu'à refaire ses énormes triolets et Page balance un solo dément, on revient au riff, joué encore plus bas, quelques micro-soli de Jimmy écoutés religieusement, l'immeuble tremble, album fini, allez on le remet que pour le duo zeppelinien ["Baby, Come Back"]...
Down: Rien, bien sûr... Ed Wood du rock, le Lord Sutch ? Certes, mais que cet album très stoogien est jouissif...