Van Halen: Van Halen (1978)
"I've always had a tremendous amount of respect for their musical ability - particularly Edward's. When I heard him on the guitar, it immediately brought me back to myself. I wanted to do the same thing with my voice and feet. Basically what I had to offer at that time was that I knew how to dance. I knew what was good dance music and, hence, could get us into clubs." (David Lee Roth)
Where: Recorded at Sunset Sound Recorders, Hollywood
When: 10 février 1978
Who: David Lee Roth (vocals), Edward Van Halen (guitar), Michael Anthony (bass guitar), Alex Van Halen (drums)
What: 1. Runnin' With The Devil 2. Eruption 3. You Really Got Me 4. Ain't Talkin' About Love 5. I'm The One 6. Jamie's Cryin' 7. Atomic Punk 8. Feel Your Love Tonight 9. Little Dreamer 10. Ice Cream Man 11. Fire
How: Produced by Ted Templeman
Up: fade in au klaxon, basse saturée métronomique, entrée sublime et monumentale du jeune Eddie qui gratte sa tête de sillet, premiers cris de hyène de Diamond Dave pour la postérité, riff ardent, opulent, festonné de fulgurances sonores inouïes, chœurs métalliques sur un refrain déchiré des piailleries démentes de Roth, un premier solo prodigieux, ultra-court, derrière c'est lourd comme du Buchholz-Rarebell la classe et le swing en plus, David dans la cour des grands en quelques strophes, une seconde couche de solo velouté au son inconnu sur zébrures rythmiques, Alex et Michael bâtonnent avec application, titre phénoménal, terrassant de virtuosité inédite ["Runnin' With The Devil"]... un méchant concassage de caisse claire, une louche de basse, et une entrée fracassante du surdoué californien, une cathédrale pyrotechnique post-hendrixienne révolutionnaire sur une guitare rafistolée, un pain caché qui empêche encore Eddie de dormir, déluge sismique de polyphonie sismique fractale en tapping, whammy bars et shred avec reverb, phaser et echoplex, fugue baroque à haute tension en arpèges démultipliés, tout est dit, du premier coup en 102 séminales et inconcevables secondes qui s'évanouissent en un ultime grognement satisfait ["Eruption"]... plus beau fondu sonore enchaîné du rock, Eddie ose "le" riff kinksesque, le vampirise illico en son crunchy et méchant, Dave tout en bagout se délecte et rugit avec gourmandise, Eddie en retrait persifle à la guitare en mille dimensions, Alex fait swinguer et assure aussi des backing vocals d'acier avec ses potes, Dave impérial, Eddie surfe sur la rythmique avec un solo en aigus délectables et narquois, on ralentit, ricochets de chuchotements potaches sur caisse claire en sourdine, explosion sonore bluffante et irrésistible, version adoubée par Ray Davies lui-même ["You Really Got Me"]... riff surflangé superbe clos par un feulement de cordes, Eddie l'air de rien affiche sans effort un génie inépuisable, insurpassable, porte tout le morceau à bout de six-cordes surnaturelles, se partage entre riffs et micro-solis, du blues dynamité par le voltage, empoigne un sitar électrique pour colorer, Dave, magistral, comme inquiet, se rembrunit un peu sur des chœurs glacés et une rythmique impeccable, un peu de flanger sur la basse, Dave lance le solo sur un féroce "Before ! Before ! Before !", Eddie prend un solo à l'élégance rare, que quelques notes, un break porté par la faconde tartarine de David ("I've been to the edge...") et les arpèges discrets d'Eddie, volume de la basse-batterie abaissé just like in the good ol' days, live in the studio feeling, harmoniques artificielles torturées de Eddie, ça repart, un nouveau solo, déluge sonore final, guitare insolente, composition à la maturité incroyable, une violence maîtrisée, tout enregistrée en live ["Ain't Talkin' About Love"]... riff énervé pour un boogie mis en échardes, une révolution en marche à chaque note, Alex piétine la double grosse caisse et catapulte son frère, Eddie en architecte-paysager sur sa home-made guitar, glisse des pointes de vitesse invraisemblables, lâche des obus sonores, prend un solo furieux en tapping, Michael dépote méchamment derrière, on stoppe la machine, break babala-choobidoowa pour rire, ça repart, son énorme d'Eddie, surtout ne pas se prendre au sérieux ["I'm The One"]... riff dansant et haché irrésistible, de toute beauté, une ballade pop surélectifiée pour un Dave cajoleur et faussement câlin, des chœurs angéliques un rien rigolards, Eddie, jeune Maître, contrôle la machine avec tact, Alex fait swinguer, break planant réussi sur backing vocals queenesques, Michael fait bouillir ses quatre cordes, Eddie assène en rigolant une créativité extraordinaire, une dextérité spatiale confondante ["Jamie's Cryin'"]... riff rendu presque exclusivement rythmique par les couches de flanger, Alex titille ses cymbales, une tension dramatique, Dave surjoue l'angoisse du punk atomique, Eddie équarrit au flanger, Alex tout en cymbales décidément lâche quelques costauds roulements, un solo déchaîné, extra-terrestre, dans les sur-aigus, on retombe sur le riff, la fin est pour Dave qui se déchire le larynx ["Atomic Punk"]... riff gros comme ça, la bonne humeur de retour, Dave goguenard et hâbleur nous chante le soleil californien, filles et bières à l'arrière de la caisse, un son rosse pour Eddie tout de même, basse roulante, une ballade d'été en somme, encore une compo dingue pour un jeune groupe sans expérience, Eddie se fait plaisir avec un solo explosif sur une rythmique chuckberryesque, répand des grappes de notes aiguës, une confiance renversante chez les quatre ["Feel Your Love Tonight"]... un autre riff superbe, grave, pour une autre ballade, Dave gouailleur nous fait une berceuse à la Bon Scott, les chœurs en rajoutent des tonnes, Eddie tricote du jamais entendu, balance un solo retors dans des aigus obliques sur une basse entièrement dévouée, une espèce de post-blues, un "Since I've Been Loving You" dépouillé, défiguré, détroussé et rhabillé par l'électricité ["Little Dreamer"]... double sacrilège avec un début blues à l'acoustique, exhumé de l'œuvre rare du bluesman John Brim, Dave blasphème patates en bouche, explosion électrique inévitable, un blues revisité, méconnaissable, ça danse comme jamais, Eddie se lance, balance tous ses plans, défriche à chaque note, donne du boulot pour trente ans aux gratteux, fait taire les procès punks, fourgue un solo moqueur, rapide, délié, des calls-and-responses avec un Dave just-a-gigoloisant à son aise, du blues à Hollywood ["Ice Cream Man"]... un sommet - le onzième du disque ? - avec une violence punk boostée aux guitares virtuoses, une intro extrêmement brutale, Anthony en profite pour placer quelques phrases, un riff magnifique comme en quinconce, pluie d'harmoniques artificielles, Dave déboule comme une panthère, rugit et crie, un titre-bolide au mur de son franchi par trois fois, une basse qui s'aventure dans des aigus frénétiques, des chœurs maléfiques ("Fiiiiiire !"), Eddie reprend le riff, les backing vocals à l'assaut, montent d'un cran et atteignent une qualité luciférienne indicible sur un nouveau riff gras sabbathien d'Eddie qui prend illico un solo clair, ondulant et souple sidérant, revient au riff pour une fin déglinguée, what a ride ["Fire"]...
Down: rien, mais alors rien du tout...