Iggy Pop: Eat Or Be Eaten
À ma gauche, une bande de bikers hurlants et menaçants tout droit sortis de l'imaginaire de feu Hunter Thompson. À ma droite, l'Iguane au sommet de sa forme, dépositaire à lui seul, devant l'Éternel, de l'imagerie sulfureuse du rock n' roll. Au final, les prémices du live le plus déjanté des Stooges. Flash back ?
Janvier 1974, un petit club du Michigan, les Stooges entament furieusement leur set devant un auditoire de bikers totalement hostile. Au bout de quelques minutes, Sa Nihilitude Iggy s'arrête au milieu d'un chanson, excédé par l'attitude de la horde de motards ne réclamant qu'une seule chanson, l'incontournable et lourdaude "Louie Louie" : "D'accord, les connards, vous voulez entendre 'Louie Louie' ? Alors, vous allez l'avoir"...
Les gars d'Ann Arbor entament alors une version apocalyptique de Louie Louie qu'ils prolongent trois quart d'heure durant, à grand renfort de paroles improvisées par Iggy, telles que les Lamartiniennes : "Vous pouvez me sucer la bite / Bande de putains de bikers pédés". Ce genre, oui.
Le concert se finit, faut-il le préciser, de manière quelque peu chaotique, un Iggy impérial descendant de la scène pour s'occuper personnellement d'un motard qui l'a insulté un peu plus que la moyenne. Après s'être fait tout aussi impérialement casser la gueule, Iggy et ses Stooges remballent.
Le lendemain, le gang de bikers, qui se surnomment les Scorpions, téléphone à WABX FM et promet de tuer Iggy et les Stooges s'ils remontent sur la scène du Michigan Palace. Le lendemain soir, les Stooges ne se font évidemment pas prier pour investir, pour la dernière fois, la salle en question et y font même tourner les bandes (du magnétophone de James Williamson) pour ce qui deviendra une partie du mythique Metallic K.O. "seul album de rock, que je connaisse sur lequel on peut réellement entendre des canettes de bière se briser sur des cordes de guitare", dixit Lester Bangs.